J'ai passé la tête dans leur bureau et comme à chaque fois ils m'ont regardé avec de grands yeux, se demandant ce que je venais faire là. Et tous trois ont pensé, au moment où je leur ai souhaité bon week-end : mais pourquoi se met-il à parler, lui qui ne parle jamais ? En guise de réponse de leur part, je n'ai entendu qu'un vague murmure de politesse.
Avec le temps, ces choses là ne me font plus pleurer. Mais il y a des jours, comme ça, où j'aimerais me taire à jamais. Je n'en suis d'ailleurs déjà pas très loin, car combien est-ce que je prononce de mots par jour ? Trente, quarante ? Non j'exagère.
Et tous ces gens bavards, de quoi parlent-ils ? Ils se demandent si ça va ou parlent de l'actualité.
Le jeu social consiste à répéter inlassablement, chaque jour, des phrases toutes faites en les saupoudrant ça et là de quelques traits d'humour, qui obligent les autres à rire.
Je me souviens de ce jour où je t'avais demandé, un peu maladroitement : raconte-moi ta vie depuis le début. Je crois que ça t'avait mis plutôt mal à l'aise.
Mais pourquoi est-ce si difficile ?
Dis-moi tout. Qui tu étais enfant, tes rêves de prince charmant, ton premier poème, ton premier baiser, tes parents, l'éducation que tu as reçue, ta vision de la vie, tes choix, tes erreurs, ce que tu as aimé au cours de tes études, ce que tu considères comme de l'art, comment tu fais pour devenir adulte et vivre comme les autres.
Même si tu m'as déjà raconté tout ça, ce premier été, raconte-moi encore. Ce sont les seuls mots qui comptent.
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